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Fée Morgane de la légende arthurienne
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Le mythe de la fée Morgane : l'ambivalence d'une femme puissante

 

Qui n'a jamais entendu parler de Morgane, fée du cycle arthurien, elle oscille entre soutien ou opposante d'Arthur et de la reine Guenièvre. Mais comment les mœurs médiévales ont-elles transformé les traits de la magicienne ? Découvrez les mystères qui entourent son mythe et ses liens avec les divinités anciennes.

 

Pour résumer cet article aux plus jeunes :

  • Dans les premières versions, Morgane était une enchanteresse, gardienne de l'île d'Avalon, le paradis celtique, et y a conduit Arthur

  • Elle est ensuite devenue une figure maléfique qui combattait les chevaliers de la table ronde et a conduit à la mort du roi

  • La magie est parfois inhérente à son statut de fée, parfois un acquis grâce aux enseignements de Merlin

  • Elle est inspirée de la déesse Morrigan et incarne le destin dans les premiers récits

  • Au fil des ouvrages, elle est parfois confondue avec Morgause et la remplace même comme demi-sœur maléfique d'Arthur

Fée Morgane au bord du lac

Quelle est l'histoire de Morgane ?

Personnage mythique et emblématique de la légende arthurienne, la fée Morgane est sujette aux controverses. Est-elle une fée bienfaitrice et protectrice ou une magicienne maléfique, déterminée à faire tomber le roi Arthur et sa cour ? Figure ambivalente du cycle arthurien, elle est décrite de façons variables dans les différents romans qui la présente.

D'une fée bienfaitrice...

Geoffroy de Montmouth, premier auteur à encrer sur le papier et à ancrer dans l'histoire la légende du roi Arthur, est également celui qui introduit la figure de la fée Morgane auprès du souverain breton dans son œuvre "Historia regum Britanniae" (Histoire des Rois de Bretagne). Il en fait une enchanteresse aux pouvoirs salvateurs, vivant avec ses huit sœurs sur l'île d'Avalon. Lorsqu'Arthur est défait, lors de la bataille de Camlann et que Mordred lui porte le coup de grâce, elle vient le chercher pour le mener jusqu'à l'île d'Avalon (parfois comparée au Valhalla de la mythologie nordique).

Elle est ensuite oubliée par Wace et Layamon, deux autres écrivains associés au cycle arthurien, avant de réapparaître dans les romans de Chrétien de Troyes. Sa première description, dans "Erec de Enide", en fait une sœur du roi du royaume de Logres, détenant des pouvoirs magiques de guérison. Elle coopère avec son frère et le soigne même, lui ainsi que Lancelot du Lac et Yvain, deux de ses chevaliers de la table ronde.

Fée Morgane dans les brumes de sa magie

... à une figure malveillante

C'est à partir de la série de cinq romans "Lancelot-Graal", toujours de Chrétien de Troyes, qu'elle va subir son premier virage du côté des forces obscures. Elle devient en effet un adversaire d'Arthur. Son affiliation y est établie et elle devient la fille d'Ygerne et de Gorlois, sœur d'Elaine et de Morgause, ce qui en fait également la demi-sœur du roi Arthur par sa mère. Dans cette version, lorsqu'Uther Pendragon (père d'Arthur) tue son père pour épouser Ygerne, il l'envoie dans un couvent pour qu'elle reçoive une éducation digne de son rang. C'est à la suite de cette formation qu'elle devient l'élève de Merlin et apprend les arts magiques. Poussée par Uther, elle épouse le roi Urien, qu'elle n'aime pas. C'est à Camelot qu'elle succombera au charme de Guiomart, cousin de la reine Guenièvre, et tomber amoureuse. Mais lorsque Guenièvre découvre cette relation adultère, elle les force à rompre, s'attirant par la même occasion la haine de la Morgane.

C'est ce moment qui devient le point de bascule dans la légende de Morgane. Galvanisée par ses désirs de vengeance, elle dirige sa haine vers la reine Guenièvre, Lancelot et Arthur, qu'elle est décidée à détruire. Dans "Tristan en prose", elle est prête à toutes les manipulations pour dévoiler la tromperie de Guenièvre avec Lancelot et pour causer la perte des chevaliers de la table ronde. Au fil des œuvres, elle prend petit à petit la place de Morgause, à laquelle elle devient étrangement liée. Elle la remplace parfois comme mère incestueuse de Mordred et comme initiatrice du chevalier pour qu'il cause la défaite puis la mort d'Arthur à la bataille de Camlann.

Aujourd'hui, elle est majoritairement représentée comme une séductrice maléfique bien qu'elle apparaisse, plus récemment, comme un personnage positif qui incarne un pouvoir féminin désapprouvé par la société médiévale.

Merlin l'enchanteur avec sa canne dans la forêt

La relation entre Merlin et la fée Morgane, une relation prof-élève ?

Avoir Merlin pour professeur de magie n'est pas anodin. L'enchanteur est présenté comme un emblème de la magie, un personnage d'une rare puissance qui prodigue à Uther puis à Arthur des conseils et surtout des services inestimables. Mais qu'est-ce qui aurait pu le pousser à accepter de transmettre ses connaissances à la fille d'Ygerne ? Si on attribue à Morgane une nature humaine et non féérique, il est d'autant plus surprenant que le grand mage, fils d'un démon et d'une pucelle, selon la légende, ait accepté de la prendre pour élève. D'après certains auteurs, Morgane aurait inspiré à l'enchanteur de puissants sentiments amoureux. Là où la multiplicité des sources rend le mythe plus complexe à comprendre, c'est qu'il arrive que l'élève de l'enchanteur Merlin soit plutôt la fée Viviane, dame du lac, plutôt que Morgane. Mais là encore, c'est un sujet menant à de nombreuses interprétations.

Plantes utilisées par Morgane pour pratiquer sa magie

Quels sont les pouvoirs de Morgane ?

D'après Geoffroy de Montmouth, Morgane était une enchanteresse de nature, une créature mythique puissante experte dans le pouvoir des plantes, l'art de la guérison, capable de voler ou de changer de forme. Dans les écrits ultérieurs, elle devient assimilable à Circé, de la mythologie grecque, qui change les hommes en porc : elle détient des pouvoirs de transmutation. C'est également une nymphe immortelle qui aurait la possibilité de partager son immortalité avec autrui.

C'est à partir de "Lancelot-Graal", quand l'origine de ses pouvoirs lui viennent de ses cours de magie avec Merlin, qu'elle emploierait ses capacités pour de néfastes desseins et la destruction du grand roi Arthur et des chevaliers de la table ronde.

Pour résumer, sans débattre sur son prétendu rôle de fée bienfaisante ou malfaisante, les pouvoirs de Morgane sont :

  • L'art de guérir et de travailler les plantes

  • La métamorphose : elle est capable de changer de forme et de transformer les Hommes en animaux

  • La capacité de voler

  • L'immortalité, qu'elle pourrait également conférer à ceux qu'elle choisi

 Représentation d'une divinité celtique dans les bois

Quel est le symbole de la Fée Morgane ?

Fée bienfaitrice, enchanteresse, magicienne maléfique ou encore sorcière, les multiples casquettes qu'a portées Morgane au fil des siècles n'aident pas à comprendre la complexité du personnage. Parfois capable de guérir ou de tuer, elle présente des similitudes avec plusieurs déesses celtiques :

  • Morrigan : Elle-même inspirée de la dea matrona de la littérature gauloise médiévale, c'est une grande déesse guerrière de la mythologie celtique

  • Sulis : Déesse locale du Somerset, elle correspondait à une déesse-mère nourricière et une divinité vengeresse qui invoquait des malédictions

  • Sirona : Déesse de la guérison dans le panthéon celte

  • Sequana : Déesse de la mythologie gauloise associée au fleuve la Seine et à un culte guérisseur lié à l'eau

Dans les premiers récits, où Morgane est une enchanteresse qui vient chercher Arthur pour le mener à Avalon, ses liens avec Morrigan sont évidents. Ils font d'elle une représentation du destin, venu chercher l'âme du roi. Dans les textes plus récents, elle sert de figure maléfique, par opposition à Viviane, la dame du Lac, entité bénéfique et protectrice dévouée de Camelot, le château du roi Arthur.

A travers les siècles, elle a tantôt été une enchanteresse, une fée, une sorcière, la demi-sœur d'Arthur ou, parfois, un mélange complexe et mortel de l'ensemble. Mais c'est également l'évolution de ce qui était à l'origine une figure guérisseuse qui rend Morgane si intrigante. Un personnage ambivalent, parfois maléfique, qui n'hésite pas à manipuler, blesser ou tuer ses ennemis par vengeance.

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