Qui est Perceval le Gallois, chevalier de la Table Ronde ?
Figure de référence de la légende arthurienne, Perceval le Gallois est connu pour sa candeur et sa naïveté, qui font de ses aventures et de son apprentissage de la chevalerie un parcours initiatique hors du commun. Découvrez l'histoire de ce jeune ingénu, élevé loin de la société et devenu icône de la chevalerie.
Pour résumer cet article aux plus jeunes :
Dernier fils d'un roi du Pays de Galles, Perceval est élevé par sa mère en marge de la société après que toute sa fratrie et son paternel ont perdu la vie
Il rencontre des chevaliers par hasard et décide de suivre leur exemple
Il s'engage auprès du roi Arthur et de sa cour, se démarquant par sa "niceté" (désigne à la fois la sottise, la naïveté et la balourdise) qui fait de lui un personnage complexe
Il croise la route du Graal, mais laisse passer cette opportunité en ne posant pas de question
Perceval doit faire pénitence pour avoir une chance de mener sa quête à bien
Son histoire est un récit d'apprentissage lors duquel il acquiert les codes de la chevalerie
"Perceval ou le conte du Graal", un roman inachevé
Si le personnage de Perceval apparaît dès le livre "Erec de Enide" de Chrétien de Troyes, publié en 1170, il faut attendre près de 20 ans pour découvrir l'histoire de ce chevalier dans "Perceval ou le conte du Graal". Malheureusement, c'est une légende qui reste inachevée, Chrétien de Troyes n'ayant pas eu le temps de terminer son œuvre. Dans la première partie du roman, on suit le personnage de Perceval, auquel on devine rapidement un destin hors du commun. Une destinée qui aurait très certainement été entremêlée à celle du chevalier Gauvain, mis en lumière dans la suite du texte.
L'intention de Chrétien de Troyes reste donc inconnue et sujette aux spéculations. Néanmoins, avec la matière dont nous disposons avec le début de ce récit, nous avons tout de même la possibilité de tracer l'histoire de Perceval. D'autant plus si nous couplons ces premiers arcs narratifs à ceux des auteurs suivants.
Quelle est l'histoire de Perceval ?
Aussi appelé Peredur dans la littérature galloise du Moyen-Âge, Perceval est connu pour sa participation à la quête du Graal et pour sa naïveté, devenue légendaire.
Un jeune homme naïf destiné à devenir chevalier
Dernier fils du roi Pellinore de Listenois, Perceval est encore très jeune lorsqu'il perd son père et ses frères. Tous chevaliers, ils meurent dans une bataille, comme pris entre les griffes d'une terrible malédiction. Sa mère, désolée par ces pertes tragiques, est décidée à lui éviter un destin similaire. Elle est persuadée que s'il prend les armes, il périra de la même façon. C'est pourquoi elle l'emmène dans un manoir isolé en pleine forêt et l'élève sur place, dans la plus complète solitude.
Ainsi dépourvu de contacts sociaux, Perceval ne connaît ni les codes ni les mœurs qui régissent les relations entre les êtres humains. Un jour, alors qu'il joue avec son javelot dans la forêt, il rencontre cinq chevaliers. Il est tout de suite impressionné par leurs statures et leurs armures étincelantes. C'est son premier contact avec la société féodale et aussi celui qui lui donne l'envie de suivre leur exemple.
Son combat contre le chevalier Vermeil, un premier pas à la cour du roi Arthur
À son arrivée, sa naïveté et son insouciance en font un personnage en marge des autres membres de la cour. Il incarne une figure d'idiot, due à son éducation solitaire. C'est lors de son affrontement contre le chevalier Vermeil qu'il révèle, aux yeux de tous, qu'il est un excellent combattant. Alors que son adversaire suit méticuleusement les règles de la chevalerie, Perceval l'attaque avec son javelot, allant à l'encontre de ces codes. C'est ce qui lui apporte la victoire et le fait remarquer par le roi Arthur.
Comment Perceval devient-il chevalier ?
Contrairement à ce que croit Perceval, ce n'est pas le roi Arthur qui l'adoube. C'est sa méconnaissance de la chevalerie qui lui donne l'impression que c'est le cas. Toutefois, il lui faut attendre sa rencontre avec Gorneman, qui le forme et lui enseigne ce qu'il a à savoir pour que celui-ci l'adoube. Perceval devient chevalier.
Sa romance avec Blanchefleur
Entre ses aventures et ses exploits toujours plus chevaleresques, le texte se concentre également sur sa découverte de l'amour courtois en compagnie de Blanchefleur. Une jeune fille qu'il épouse après avoir délivré son royaume d'un siège.
Perceval et le Saint Graal
Comment parler des chevaliers de la Table Ronde sans mentionner le Graal ? Cet artéfact, dont le lien avec la chrétienté s'est renforcé au fil des textes jusqu'à devenir le récipient dans lequel Joseph d'Arimatie aurait recueilli le sang du Christ, est supposé apporter prospérité au royaume de Logres et à la cour du roi Arthur.
Le Roi Pêcheur
Dans le roman de Chrétien de Troyes, Perceval croise la route d'un vieil homme, un roi Pêcheur, blessé. Il l'accompagne dans son château et découvre une procession lors de laquelle un objet, un récipient, l'intrigue. Pourtant, étant donné qu'il a appris avec Gorneman les codes de la chevalerie et les prérequis sociaux, il ne pose pas de question. C'est une cruelle erreur puisqu'il laisse passer le Graal.
Quel est le péché de Perceval ?
Si Perceval échoue et reste pétrifié, lors de la procession du Graal, c'est parce qu'il a péché. Il est parti, abandonnant sa mère, qui est morte de chagrin. Ses erreurs sont celles d'un jeune homme en plein apprentissage.
Il ne comprend pas ce qui se passe chez le Roi Pêcheur et se retient de laisser parler sa curiosité naturelle. Ce n'est que par la suite qu'il apprendra qu'il a laissé passer le Graal et qu'en posant ses questions il aurait également pu soigner le Roi Pêcheur.
Quelle est la morale de l'histoire de Perceval ?
Afin de pouvoir se lancer dans la quête du Graal, Perceval doit faire pénitence. Il faut qu'il soit pardonné et surtout qu'il se pardonne à lui-même. Deux enjeux qui lui permettent de s'introduire aux mystères du Graal. Malheureusement, le récit, non achevé, ne nous permet pas de connaître la fin. Peut-être que, dans sa version, l'auteur médiéval souhaitait que le naïf Perceval soit celui qui trouve le Graal ?
Perceval, entre naïveté et bravoure
Chrétien de Troyes n'est pas le seul à avoir dépeint notre chevalier naïf. Dans le texte de Robert de Boron, la place accordée au christianisme est de plus en plus importante. On commence à parler de "Saint" Graal, on ajoute des comparaisons avec le nouveau testament, notamment en ajoutant une treizième place à la Table Ronde.
Ce siège, nommé "siège périlleux", est maudit. On raconte que celui qui y prendra place, s'il ne mérite pas de s'y asseoir, sera englouti par la terre. Et c'est tout en insouciance que Perceval s'y installe, faisant trembler le sol. On a donc toujours, dans les récits qui suivent, un homme si naïf et innocent qu'il en devient d'un courage à toute épreuve.
Perceval : une figure d'apprentissage
Perceval est avant tout un adolescent qui découvre progressivement les lois de la chevalerie et enchaîne les "premières fois". De naïf, insouciant et curieux, il devient un chevalier loyal, preux et dévoué. Chacune de ses rencontres et de ses interactions a pour but de faire un peu plus avancer ses aventures initiatiques. Il apprend le courage et les codes de conduite auprès d'Arthur, de sa cour et du chevalier Gorneman ; et c'est Blanchefleur qui lui enseigne la courtoisie et les valeurs de l'amour.
La "niceté" de Perceval, un défaut ou une qualité ?
Le terme "niceté" désigne à la fois la sottise, la naïveté et la balourdise. Bien qu'il ait des connotations négatives, il n'est pas un défaut en tant que tel. C'est un qualificatif qui correspond particulièrement à Perceval. Au fil de son initiation, il apprend à transformer sa niceté en arme, incapable de se dissocier pleinement de qui semble inné chez lui.
Un récit initiatique teinté par la violence : les combats de Perceval
Dès le début, la violence est présentée comme source des malheurs de la vie de Perceval. C'est à cause d'elle que son père et ses frères ont été tués, que sa mère souffre et qu'il est isolé pour sa propre protection. Elle est ensuite présente lors de nombreux combats : celui contre le chevalier Vermeil, lorsque Gorneman lui apprend les codes de la chevalerie, quand il prend les assaillants du château de Blanchefleur un à un, etc.
L'ensemble de ces combats sont violents, ce qui peut être surprenant considérant le caractère courtois de la littérature médiévale. En réalité, Chrétien de Troyes les utilise pour souligner les codes de la chevalerie et montrer que, petit à petit, Perceval en suit les préceptes. Il prend progressivement part au modèle stéréotypé des combats singuliers, ce qui rend son évolution d'autant plus flagrante.
Le personnage du roi Pêcheur, une figure symbolique
Depuis des siècles, l'image du poisson est liée aux différentes mythologies et religions. Souvent symbole de prospérité et d'abondance, on peut comprendre la présence de cette iconographie dans la quête des chevaliers de la Table Ronde.
Un Roi lié à la mythologie celtique...
On retrouve plusieurs similitudes entre le Roi Pêcheur et des figures de la mythologie celtique :
Nodens : Dieu des morts, il pêchait les âmes comme le ferait un homme avec le poisson
Dagda : Dieu-druide le plus important des Tuatha Dé Danann dont le chaudron est le talisman
Bran le Béni : Issu des Triades galloises et détenteur d'un chaudron magique qui ramènerait à la vie
Le conte "Culhwch ac Olwen", dans lequel les chevaliers d'Arthur sont à la recherche d'un chaudron magique
S'il est indéniable que l'auteur s'est inspiré de ces croyances pour l'écriture de son roman "Perceval ou le conte du Graal", il reste naturel de se questionner sur les raisons de cette adaptation et de se demander comment auraient tourné les aventures de Perceval (et potentiellement de Gauvain) si le roman avait été achevé.
... ou intrinsèquement mêlé aux croyances chrétiennes
Dès sa première apparition, le Roi est qualifié de "Pêcheur". Bien que le texte soit moins centré sur les ponts entre la légende arthurienne et la religion, on peut y voir le symbole évident de la chrétienté avec le poisson, symbolisant le Christ. Une représentation qui devient d'autant plus claire après les interprétations de Robert de Boron qui établit les premières relations entre Christ et Graal.
Chez de Boron, le Roi Pêcheur est appelé "Bron", un nom qui n'est pas sans rappeler Bran le Béni que nous venons de mentionner. Ce personnage serait chargé de trouver la lignée des gardiens du Graal, dont Perceval serait supposé faire partie. Par la suite, on fera parfois du Roi Pêcheur le grand-père ou l'oncle de Perceval, ce qui renforcera la complexité de sa relation avec l'artéfact.
Le parcours initiatique de Perceval, de sa rencontre des chevaliers et de leur univers jusqu'à sa plongée dans la quête du Graal, a permis de révéler le héros qui sommeillait au cœur de la forêt. Dans les textes et versions suivantes de la légende arthurienne, il perd de son importance au profit de Galaad, fils de Lancelot du Lac, qui devient le héros du Graal. Néanmoins, il reste un personnage important puisqu'avec Bohort, ce sont les deux seuls chevaliers de la Table Ronde à avoir accompagné Galaad au château du Graal.
